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mardi 29 juillet 2014

On déballe tout ou on se déballonne ? (1)











Bon, n'importe quoi, plein de cafouillages comme d'habitude : on n'est pas à la fin des années quatre-vingt-dix mais évidemment au début !
Et le village où j'avais emménagé juste avant de remonter à Paris, c'est Prugnanes (deux jours que je cherche ce nom !)

En plus, je l'ai pas attendue à l'arrêt du bus, le belle Hélène : j'ai doublé ce foutu bus pour me garer fissa un peu plus haut, j'ai redescendu à pied le boulevard jusqu'à l'arrêt précédent et lorsque le bus est arrivé je suis monté dedans, j'ai poinçonné mon ticket et suis allé m'asseoir à côté de l'unique passagère, Hélène, assez surprise mais qui a vite recouvré ses esprits.

lundi 28 juillet 2014

La nuit de l'asphyxie









samedi 26 juillet 2014

Un modeste artisan de la cinéphilie parisenne







Désolé, grosse fatigue, c'était — comme dirait Cléo — entre cinq et sept heures ce matin, je me suis embrouillé à plusieurs reprises. Armand Tallier a créé après-guerre non pas une… section (!), mais la Fédération Internationale des Cinémas d'Art et d'Essai. Le dernier film de Gainsbourg, celui dont j'ai malencontreusement ravagé une copie, s'intitule Charlotte for ever — j'ai confondu avec la chanson Lemon Incest. Le premier support chimique du film, hautement inflammable, c'était pas de l'acétate de cellulose, mais du nitrate de cellulose. Et la galette de film, c'est évidemment à la verticale qu'on la bascule du plateau pour la caler contre le genou, pas à l'horizontale !

 
Note du 30 juillet : Quelques précisions supplémentaires, aimablement fournies par l'ami Richard — propriétaire en titre du cinéma à l'époque — après qu'il a eu la patience, donc,  d'écouter cette logorrhée : « Donc ce "cinéma des Lilas" c'était le Studio des Acacias, dans la rue du même nom. Donc je n'étais pas vendeur de voitures, et je me suis glissé six mois dans cette activité que j'avais en horreur puisqu'il s'agissait de prendre à des malheureux un maximum de fric en leur refilant des épaves — les belles voitures, j'aimais les vendre. Donc je n'ai pas acheté le Studio avec l'argent de Bakouche et Danièle, mais lui s'est porté caution sur ses biens pour l'emprunt, ce qui a permis d'acheter les murs, le fonds ne valant plus rien. Il est exact en revanche que ce que tu appelles mon charme a, je ne sais pas pourquoi, puissamment agi sur Line Peillon qui [jusque là] ne voulait pas vendre. Donc d'autres rectifications seraient à dire mais présentement, la précision précise n'est précisément pas ma préoccupation… » 
 
Richard en 2014, s'apprêtant à ouvrir une salle d'art et d'essai dans le Caucase

jeudi 24 juillet 2014

Pas sciés face aux huissiers ?
— Hé bé si, finalement…




Une excellente parodie d'un morceau tragique à souhait du deuxième albome de Téléphone :



(Pour rappel, la première partie de cette passionnante saga est ici)

lundi 21 juillet 2014

Impératif catégorique quasi-kantien pour cet été



« Comporte-toi en permanence comme Clint Eastwood dans un film de Sergio Leone — ou à la rigueur Lee van Cleef, ou même chez Elio Petri [merci, Florence !], comme tu veux, pourvu que ce soit avec Ennio Morricone en bande-son.
Mais bon, sinon, tu fais comme tu veux, hein, on n'est pas chiens, plutôt sceptiques que cyniques…
… Mais vas-y, fais-le, va, fais l'effort ! »



Et le tube de l'été, indubitablement (sans vouloir paraître grossier) — et même de plusieurs :

dimanche 20 juillet 2014

Manset… tout de même pas croyable, tant d'estime de soi !



À l'occasion de la sortie de son dernier album, Un oiseau s'est posé, essentiellement composé d'auto-reprises de chansons plus ou moins anciennes et parfois en compagnie d'autres artistes, Gérard Manset a donné le 14 mai dernier une intéressante interviouve à la Radio Suisse Romande, très finement menée par Karine, dont on pourra entendre l'intégralité sur cette page (désolé, pas de lecteur exportable proposé par la RTS).
L'émission qui a été diffusée est audible ici.

Bien qu'il s'y montre parfaitement imbu de lui-même tout en s'en défendant (mais peut-être à juste titre, non ?), Manset, entre deux coups de fourchette et trois quintes de toux, délivre de très intéressants aperçus (enfin, à mon sens du moins) sur tout un tas de sujets.

Le début de l'émission donne le ton, c'est complètement désarmant :
— « Gérard Manset, bonjour.
— Oui, bonjour.
— Comment allez-vous ?
— Euh… raisonnablement, euh… dans quel sens, cette question ? Parce qu'il y a tellement de personnalités chez moi… certaines peuvent aller, d'autres un peu moins mais… non, non, ça va très bien. »



Mais faut se dépêcher, va bientôt falloir que l'artiste se pose, en effet, car il atteindra bientôt la limite d'âge qui a déjà frappé… Alain Veinstein, entre autres…

— Tiens, à propos de ce dernier et de la suppression guillotinante de Du Jour au Lendemain, un morceau de l'album Le langage oublié (2004) qui tombe à pic :


vendredi 18 juillet 2014

Euh… Hé ben, en fait, euh… voilà…
Bon, d 'accord !


Les remembrances d'un Weaver idiot, deux versions (la deuxième, même entrecoupée de préparations culinaires, est meilleure, il me semble) :







Qui peut faire de l'avoine sans vendre ?
Qui peut raquer sans drame ?






Canicule : temps de chien ?



À cette heure à Paris, 40° à l'ombre au bas mot, impossible de bosser ni même de penser, juste essayer de tenir.
Boulevard désert, écrasé sous la chape de chaleur.

Vivement la nuit et la voix rafraîchissante d'Alain Veinstein !
(ah non, zut, pardon, ça aussi c'est liquéfié — mais qui lit Keffieh, à part dans la bande de Gaza ? — où ça gaze à mort en ce moment, soit dit en passant…)

jeudi 17 juillet 2014

L'arrivée au studio 133
(à la manière d'Alain Veinstein)


J'avais oublié que ça s'appelle la Maison de la Radio : on est donc censé s'y sentir toujours un peu chez soi, quoi…
Mais pour Alain Veinstein ce n'est plus le cas, depuis le 4 juillet.

Tiens, ça me rappelle le film de Nicolas Philibert, La Maison de la Radio, qui comporte une séquence d'un Du jour au lendemain de février ou mars 2012.

Et vu du ciel, ça explique l'ancien logo de France Inter, de 1978 à 1985.

Voici l'incipit de L'intervieweur (Calmann-Lévy, 2002), première réflexion publiée par Alain Veinstein sur son métier d'homme de radio avant le magnifique Radio sauvage (Le Seuil, 2010).

L'élocution peut sembler caricaturale, il est vrai, mais c'est pas facile de faire du Veinstein, même quand on l'a écouté presque tous les soirs depuis trente ans…) :

mercredi 16 juillet 2014

Quelques réflexions hétérodoxes à propos de Socrate



C'était dimanche dernier au petit matin, on pouvait entendre sur France Culture la rediffusion d'un entretien avec François Roustang datant du 23 mars 2010, hypnotique émission des Racines du ciel intitulée « Socrate : chaman ou philosophe ? »



« Quand on croit encore à quelque chose,
on est foutu ! »

samedi 12 juillet 2014

France Inter, samedi 2 décembre 1978



La meilleure radio française du ouiquènde dans les années soixante-dix, c'était France Inter, riche de sa fameuse émission qui courait du samedi après-midi au dimanche soir, L'oreille en coin, produite par Pierre Codou et Jean Garretto, surtout connue pour les chansonniers du dimanche midi mais qui comportait bien d'autres séquences.

Le samedi à 16 h, quelques années durant, la parole était donnée à un adolescent de l'époque, peut-être pour prendre le pouls de la jeunesse post-68, dans une séquence animée par François Jouffa et Simon Monceau (qui est tombé bien bas depuis, le pauvre !), Le cahier à spirales.

Voici celle du 2 décembre 1978 (pas inintéressant d'écouter le journal de l'époque, au milieu de l'émission, d'autant que le jeune en question est pris d'une quinte de toux qui déstabilise un peu la spiquerine) :

Un monde sans A… lain Veinstein






Ah ! l'affliction s'avérait assez attrayante, affreuse, abominable, archi-désolé d'appuyer ainsi et de m'appesantir…

vendredi 11 juillet 2014

Veinstein, again



devient



Je me permets de reproduire ci-dessous, à propos de la suppression brutale de Du jour au lendemain, un commentaire très développé et particulièrement pertinent (un peu perdu dans les limbes du billet précédent), dû à un certain Viederland qui a atterri ici depuis le site de l'ami Fañch.

Je crois malheureusement que le sentiment de José est partagé par beaucoup : pourquoi le vieil homme refuse-t-il de se mettre à la retraite ? A découvrir pas mal d’autres réactions, pour la plupart haineuses, notamment sur un forum de news appartenant à Orange, j’ai pensé qu’il ne fallait pas chercher bien loin pour expliquer ces points de vue. Ce qu’on reproche à Veinstein, c’est sa santé même, odieusement couplée avec quelque chose qui à mon sens relève d’un statut d’artiste, statut qui se détache donc, avec superbe et en la matière, d’une simple production radiophonique, et n’a plus rien à voir avec le fait d’exercer un métier, d’avoir dans la société une place assignée, avec une fonction claire.

En revanche, le ressentiment à l’égard de l’artiste est tout à fait clair, s’accompagne d’une odeur, d’un climat qui ne trompe pas — quand on connaît intimement les rouages d’un tel processus. Or, tout homme qui n’a pas eu justement le courage d’une telle vocation s’emploiera à la nier, du haut de toute son ignorance et souvent avec une certaine méchanceté. C’est la rage égalitaire dressée contre le mystère élitiste — élitiste par défaut. A partir de ce postulat, les protestations sont primaires : Pourquoi ne sait-il pas s’arrêter ? Pourquoi ne laisse-t-il pas place aux autres ? Pourquoi travailler encore ? Et quel était son salaire ? Et il se croit indélogeable ? Et il se croit propriétaire ? Et pourquoi ne s’est-il pas engagé ? Et pourquoi n’a-t-il pas su infléchir sa femme à tel et tel moment ? Mais José va plus loin, en disant que s’il se fait virer, c’est un juste retour de son désengagement. Comme si l’artiste devait nécessairement être engagé. Eh bien non, il arrive qu’il ne le puisse pas ou ne le veuille pas. C’est déjà bien assez de proposer et d’opposer une œuvre à l’anarchie du monde, on ne peut pas être tous des René Char ou des Benjamin Péret.

Mais de toutes façons, avant même que ces questions se posent, la majorité des intervenants ne voient pas les années-lumière qui séparent l’émission d’Alain Veinstein de toute autre proposition relevant du même support. Du moins, ils le pressentent juste assez soit pour fabriquer de la bile, soit pour le nier tout à fait. Or, c’est précisément cette distinction positive (l’inouï d’une proposition radiophonique) qui me fait écrire et batailler dans le vide. Car on ne sait pas qui je suis mais si on pouvait le savoir on trouverait mon intervention aussi impossiblement bizarre que si quelque Antonin Artaud postulait comme cadre chez Loréal ou se mettait à gratter des Bingo pour se payer une télé.

En clair, le travail de Veinstein est si profondément lié à la littérature et à la poésie, c’est-à-dire de bout en bout et sous le signe d’une rare perfection formelle que cela me force à sortir de mon trou, pour des réactions « à chaud » dont j’ai en principe horreur — surtout quand il faut en plus mouliner pour répondre à des nigauds, pour lesquels la forme n’est qu’une enveloppe — ou une question de second ordre. Tandis que, bien entendu, nous autres savons depuis longtemps qu’elle est tout — obéissant elle-même à une dialectique des plus complexes, qui l’invalide à son tour, etc, etc. Mais à quoi bon s’échiner pour un public qui met sur un même plan Yves Duteil et Stéphane Mallarmé ? — et pour le coup probablement incapable de profiter pleinement et de l’un, et de l’autre.

Quant à l’émission censurée, on y apprend surtout qu’Alain Veinstein n’a jamais eu l’intention de mettre fin à ses entretiens. Faut-il expliquer pour les bébés et les esprits malveillants qu’il en a eu mille fois la tentation « pour lui-même », de soi à soi ? Je ne sais pas, gageons que c’est inutile. En tous cas, l’hypocrisie de la direction éclate pour de bon, le doute est levé. Hypocrisie, voire mensonge pur et dur, doublé d’un nouvel affront : l’absence de motif valable à l’éviction de ce programme. On découvre aussi la soudaineté de l’exécution : le crime par voie électronique, le cadavre enfoncé dans la tartine de confiture. C’est du Agatha Christie ? Et quoi, après vingt-neuf ans de service, comme il s’en étonne lui-même, pourquoi ne pas lui laisser plus de temps, pour apprendre à se retirer et surtout, répartir tant bien que mal le choc de l’échéance ? En ce qui me concerne je me serais insurgé avec la même conviction, sauf que là, même l’élégance est absente — à supposer qu’elle change quoi que ce soit à l’affaire. Disons qu’un bon bourreau se doit d’avoir de bons outils, même si cela ne réduit pas la peine.

De toute façon, puisqu'il n’entendait pas mettre un terme à son émission, il eut été bon d’avoir au moins de vraies raisons, des motifs développés justifiant cette décision, par exemple une critique de fond, surtout à l’endroit d’une proposition complètement unique, à ma connaissance sans équivalent. C’est exactement comme si un éditeur disait à un auteur : — écoute, tu as publié une quarantaine de livres, il est temps pour toi de passer à autre chose. Il ne dit pas — écoute, je trouve que tu te répètes, ou encore : je ne peux soutenir tes nouvelles positions. Non non, il dirait justement RIEN, rien que l’on puisse seulement comprendre. Est-ce seulement imaginable ?

De la même façon, on dirait à Brian Eno, à David Bowie, à Genesis P. Orridge, à Robert Fripp, à Peter Hammill, à Robert Ashley, à Scott Walker : — écoutez les gars, vous avez fait assez de disques, vous avez fait beaucoup de concerts, il est temps de penser à vous reposer, place aux jeunes, il n’y a plus de place dans les ordinateurs, dans les bacs à disques et dans les consciences, plus de désir à votre endroit, stoppez tout, vous avez passé l’âge de la création. Ce truc-là, cette folle idée mais ça n’existe même pas, on le comprend aisément, c’est juste monstrueux, c’est carrément décadent. C’est un peu : - tiens, si je me retirais un poumon pour voir ce que ça fait ? Si j’essayais de le remplacer par une boîte à chaussures — juste pour voir ? Et si je décidais de suicider une des meilleures émissions-radio que la France ait jamais proposée ? Ce ne serait pas le genre d’idées qu’ont précisément ce qu’on appelle les « créatifs » ? Le genre de nigauds qui travaillent dans la Com et finissent parfois avec des « responsabilités prestigieuses » — alliant probablement leurs superbes idées à certaines « qualités humaines » dont un milligramme ferait certainement mourir sur le champ le plus modeste des poètes.

Ah, il y a aussi la fameuse grille, comme si cette grille n’était pas elle-aussi une fiction — et une chance. Alors franchement, en radio, la grille, comme la charte, il serait bon de penser un jour à en faire quelque chose. Comme si l’on manquait de place ou même de financement — dans un pays dont même les poubelles regorgent de richesses et d’argent gâché — de travail gâché, de temps gâché, de culture flouée. On ne voudrait plus mettre un sou pour la nuit ? Que veut-on au juste ? Favoriser les grands groupes de presse et les grands éditeurs ? Pourquoi ne pas tout de suite fermer les écoles ? Car si l’émission d’Alain Veinstein n’arrivait pas dans les premières lignes en matière d’entrée en littérature et défense de la littérature, alors je suis devenu fou.

Un problème avec l’autorité ? Justement non. Car l’autorité est du côté du talent, non de ceux qui en vivent avec sur lui droit de vie et de mort. C’est toute la différence entre pouvoir et autorité. Pardon d’y revenir, mais je reste confondu par la dose de bêtise et de méchanceté à l’égard des anciens, quand le flot d’ordures internet vient résonner étrangement avec ce qui se passe en haut lieu, dans un cénacle prétendument « cultivé ». Cela me semble encore plus bizarre dans un pays où l’art est non seulement devenu à la mode, mais presque un paradigme, un modèle de vie où finalement viennent se bousculer toutes les confusions, les rivalités hypocrites et les désirs inassouvis, exacerbés de toutes parts. D’instinct — car il fait bien trop chaud pour penser — je dirais qu’on ne sait plus quoi faire avec les maîtres. Trop orgueilleux, trop frustrés, trop distraits, trop pressés pour y faire complètement allégeance, pas assez gangrenés, pas assez abrutis pour les envoyer au néant sans scrupules, en tous cas sans tartuferie — ce recours attestant, réjouissons-nous, d’une attitude qui penche encore du côté de la civilisation. Le chronomètre pour les poissons, voilà qui en dit long sur les vanités.

Petits et grand auteurs, relégués au fond de la Seine, c’est exactement cela. Ou comme a dit Adieu Maldonne dans son billet, on arrache d’un coup l’identité d’une vie, la pellicule impressionnée de son boitier d’ombre. Ah, la grosse main parfumée capable d’un tel geste, l’histoire la retiendra aussi, si tant est que nous ne soyons pas assez crétins pour menacer cette histoire elle-même… à grand renfort de mauvaises décisions.

Voyez la tour Eiffel, pourquoi ne pas la démonter aussi ? N’a-t-elle pas fait son temps ? Était-elle prévue pour durer ? Ah mais voilà, il n’y a pas de porte-clefs « Du Jour au Lendemain » et au Japon on ne se dit pas « la France, le pays des vraies émissions littéraires ».

Au départ je n’avais rien voulu savoir sur l’auteur de la décision, craignant de ma part un emballement thermique, suivi d’une logorrhée peu amicale, déshonorante pour tous. Aujourd’hui, je découvre avec étonnement que je n’ai pas affaire à un personnage forcément épais mais à quelqu’un qui donne dans les René Daumal, les Kierkegaard et compagnie. Pour le coup, me voici complètement perdu. Que s’est-il réellement passé ? Je suppose que ce n’est pas M. Poivre d’Arvor tout seul qui prend les décisions, si ? N’y a-t-il pas eu quelque chose comme une réunion, un vote, je ne sais pas ? Une pression quelconque ? Car au fond, la seule raison explicable, pour l’instant, c’est l’argent ? Ou quelque chose d’autre m’aurait échappé ?

samedi 5 juillet 2014

Quand culture rime avec censure



On a appris avec pas mal de dépit voici une dizaine de jours, par un entrefilet dans Télérama, que l'un des derniers piliers historiques de France Culture, un de ceux qui avaient contribué à forger l'esprit des années d'or de la chaîne (1975-1999), Alain Veinstein, était limogé sans ménagement : l'émission Du jour au lendemain  qu'il avait enfantée voici presque trente ans, en septembre 1985, ne sera pas reconduite à la rentrée 2014.
Pourquoi ?
La direction avait d'abord avancé des raisons d'âge — Veinstein approche les 72 ans, l'âge de la momification, non ? et sans doute sur le point de sucrer les fraises — mais en fait, non (sans doute s'est-on rappelé que Juppé compte se présenter en 2017 ?), question de budget : contraction l'an prochain.
Bon sang mais c'est bien sûr ! d'autant que deux micros dans un studio avec un technicien aux manettes, c'est sans doute l'émission la plus coûteuse de cette chaîne qui ne regarde pas à la dépense lorsqu'il s'agit d'envoyer des journalistes à l'autre bout du monde pour des émissions spéciales !

Coup de pute sur le gâteau : Veinstein, apprenant cette poignarderie à la Iago, modifie la programmation de l'émission de la nuit du 4 au 5 juillet — qui sera donc la dernière — pour proposer un ultime opus, seul pour la deuxième fois en 29 ans (la première, c'était ici, magnifique hapax).

Mais il a commis l'erreur d'annoncer la chose dans un billet de présentation de l'émission, ceux de la haute ont fait dans leur froc et nous ont balancé en lieu et place une banale rediffusion rassurante, sans bien évidemment rien annoncer aux auditeurs plus attentifs qu'attentistes — « Rien à branler de ces connards d'oreilleux ! », doit-on se dire dans les sphères de la Maison Ronde…
Allez boum ! Censure directe, à sec avec du sable !

Bon, pfff…, encore une histoire lamentable qui témoigne de la beauté fulgurante de notre époque ; rien à ajouter en fait à ce qu'a déjà bien mieux dit l'ami Fañch sur son excellent blogue (et l'on peut aussi se rapporter à ce fil de discussion).

Mais fouchtra ! il va sacrément me manquer, ce passage du jour au lendemain, et ces « Mmmh » qui suggéraient tout !

Note du mardi 8 juillet : Je suis tellement fumasse que du coup j'ai rédigé une pétition (moi qui ne vote jamais !) :

Signer la pétition : Contre la suppression de Du jour au lendemain, le limogeage d'Alain Veinstein, et les dérives de...

Note du mercredi 9 juillet — La station a fini par se décider à mettre en ligne l'émission censurée, avec une note censément explicative :




« La direction de France Culture a considéré que le dernier enregistrement d’Alain Veinstein ne correspondait pas au cahier des charges de cette émission et au contrat qui nous engage de part et d’autre: il n’appartient en effet pas à un producteur d’une chaîne de consacrer l’intégralité de son programme à sa propre situation personnelle. », tentent-ils de se dédouaner : ah bon ?
Alors pourquoi ont-ils laissé passer sans sourciller l'émission du 17 septembre 2005 ci-dessus rappelée en lien ?
Et puis, soit dit entre nous, cahier des charges, ça fait juste qu'à chier des rages

Note du jeudi 10 juillet : Ultime (?) revirement dans ce ballet minable, la station a finalement retiré de la page du site sa ridicule présentation (fautive de surcroît puisqu'ils s'inquiétaient faussement de créer « des précédents »…), et bien sûr, impossible d'écrire un commentaire là-bas.
Heureusement que l'ami Fañch a eu hier la présence d'esprit de le recopier sur son billet de clôture de cette triste affaire :

« Les auditeurs de Du jour au lendemain du vendredi 4 juillet 2014 ont entendu la rediffusion d’un entretien d’Alain Veinstein avec Pierre Lemaître.

La direction de France Culture a considéré que le dernier enregistrement d’Alain Veinstein ne correspondait pas au cahier des charges de cette émission et au contrat qui nous engage de part et d’autre: il n’appartient en effet pas à un producteur d’une chaîne de consacrer l’intégralité de son programme à sa propre situation personnelle.

Considérant qu’il s’agissait là d’un plaidoyer qui n’avait pas sa place sur l’antenne, au risque de créer des précédents injustifiables dans le cadre du service public, nous ne l’avons pas diffusé.

Mais en raison du lien particulier et amical qui nous lie à Alain Veinstein et à son travail radiophonique sur France Culture, et ne voulant pas priver les fidèles de Du jour au lendemain du témoignage de son producteur, nous rendons librement accessible à tous l’enregistrement original. La direction de France Culture »

——————

En complément, l'article d'Amaury da Cunha paru dans Le Monde daté 6-7 juillet 2014 :

C'était un rendez-vous nocturne, incontournable pour les amateurs de littérature, de radio, de silences et de confidences. A minuit, sur France Culture, du lundi au vendredi, depuis 1985, Alain Veinstein incarnait la voix intime de l'intervieweur dans son émission « Du jour au lendemain ». Petite musique de jazz en préambule, lecture d'un extrait de l'auteur invité, l'échange pouvait commencer. Vendredi 4 juillet, cette aventure s'est achevée.
Avec une voix suave et mélancolique, Alain Veinstein, homme de radio, mais aussi poète, prenait son temps. Pas question de précipiter ou de provoquer artificiellement les choses. Dans son studio feutré de la Maison de Radio France, il a reçu 6 800 écrivains, des plus notables (Marguerite Duras, Pascal Quignard…) aux plus confidentiels. Parce qu'il inspirait la confiance et l'amitié, il a réussi à convaincre les plus secrets d'entre eux – comme Louis-René des Forêts – à s'entretenir avec lui.
Car, dans ce face-à-face, il ne se posait jamais en critique dépositaire d'une quelconque autorité littéraire. Il restait à l'écoute, à distance ; sans jamais vouloir prendre le dessus sur l'échange. «A la radio, l'exigence se partage entre l'autre et soi. On n'imagine pas le trapéziste sans le porteur », écrivait-il récemment sur Twitter.
Quant à sa technique d'intervieweur, elle reposait sur des questions qui plaçaient toujours l'écriture sur le fil de la vie, mais aussi sur des silences, comme des « amorces de réponses », selon les mots de son ami Yves Bonnefoy.
Fin juin, la direction de France Culture a décidé de mettre fin à l'émission pour des raisons de restrictions budgétaires. « Ce fut un coup brutal, mais je m'y attendais, explique Alain Veinstein. L'an dernier, on m'avait déjà souligné mon âge. Encore un an, monsieur le bourreau, avais-je demandé ! »
Pour sa dernière émission, à 71 ans, Alain Veinstein avait choisi d'être seul, face à lui-même. Comme s'il reprenait la parole après l'avoir donnée aux autres pendant toutes ces années. Vendredi, à minuit, dans une émission préenregistrée, on aurait dû entendre les derniers moments de « Du jour au lendemain », rebaptisé pour la circonstance en «  Du jour sans lendemain ».
Pendant les trente-cinq minutes de cet enregistrement, Alain Veinstein se lançait dans un étrange et émouvant monologue : fustigeant la violence du monde de la radio, tout en rendant hommage à ces grands moments de conversations enregistrées.

« Censure rare à la radio »
C'est un homme brisé qui s'est exprimé, soudain privé de ce rendez-vous de minuit qu'il avait fini par identifier à sa propre vie. Mais, une heure avant la diffusion de cette émission, Alain Veinstein a reçu un mail d'Olivier Poivre d'Arvor, le directeur de France Culture, lui expliquant qu'elle n'aurait finalement pas lieu : « Nous avons écouté l'émission de ce soir, et nous avons décidé de ne pas la diffuser. (…) Outre qu'elle ne correspond en rien à l'objet de ton émission, elle ne te rend pas hommage. Trente-cinq minutes de récits subjectifs, et de discussions internes ne regardent en rien l'auditeur. »
Pour Alain Veinstein, stupéfait, cette décision est un choc supplémentaire : « Une telle censure est rarissime à la radio, confie-t-il. Je n'ai rien fait de mal, je n'ai fait que tirer un trait sur vingt-neuf années d'émissions. »

Et un extrait de la dépêche AFP du 5 juillet :

France Culture a fait valoir que la radio « s'était entendue avec Alain Veinstein sur l'arrêt de son émission depuis plus d'un an » et que « ce dernier avait accepté le principe d'un nouveau rendez-vous annuel de 40 émissions pour la grille d'été » de 2015. « Nous en étions à convenir des modalités de cette nouvelle collaboration quand Alain Veinstein a choisi de rompre le contrat et de transformer la dernière émission de Du jour au lendemain — censée accueillir un écrivain — en un monologue de 35 minutes sur sa propre situation professionnelle », ajoute la station. « Une radio de service public n'est ni une antenne privée, ni le lieu de plaidoyer pro-domo, et ce pas plus pour Alain Veinstein que pour aucun d'entre nous (...). Assurer le renouvellement des générations à l'antenne, c'est aussi conforter l'avenir de France Culture », poursuit-elle.

Note du 19 juillet : Amos M. Reichman a publié hier une belle tribune sur le site du Nouvel Obs : « France Culture, tu  fais mal à mes nuits »

vendredi 4 juillet 2014

Le refus du statu quo et l'attraction de l'utopie



De passionnants aperçus sur l'histoire du XXe siècle pouvaient s'entendre cette nuit sur France Culture, de la bouche d'Arthur Kœestler — quasi-sosie de Robert Mitchum — interviouvé en 1973 par Éric Laurent :


(désolé pour la piètre qualité du son : j'ai dû compresser à mort pour que le fichier puisse être hébergé chez ces crevards de DiveChère)

« Une triste vérité est préférable à une belle mensonge… »